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Kabila: procès inédit, neuf dossiers explosifs

Selon l’auditeur général des FARDC, Kabila est poursuivi pour participation à un mouvement insurrectionnel, crimes contre la paix et la sécurité de l’humanité, homicide intentionnel, trahison, apologie de la rébellion, viol, torture, déportation et occupation armée de la ville de Goma. L’ancien président est accusé d’avoir activement soutenu les activités du mouvement armé AFC/M23. Ce procès intervient dans un contexte particulièrement sensible, alors que des pourparlers de paix sont en cours à Doha entre le gouvernement congolais et l’AFC/M23. La présence de Joseph Kabila dans les échanges indirects, via certains de ses proches, avait été évoquée par le Vice-Premier ministre en charge de l’Intérieur et de la Sécurité, Shabani Lukoo, qui déclarait récemment que «l’accord de Doha prévoit une prise en charge globale de tous les protagonistes». L’ouverture de cette procédure judiciaire remet en lumière les tensions persistantes autour de la pacification de l’Est du pays. Le Conseil national de suivi de l’Accord de la CENCO -CNSA- a appelé à préserver l’intégrité nationale et à renforcer les mécanismes de cohésion.

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Un tournant historique s’annonce ce vendredi dans la capitale RD-congolaise. L’ancien président de la République, Joseph Kabila Kabange, est convoqué devant la Haute Cour militaire dans un procès qui pourrait bouleverser le paysage politique national et fragiliser les pourparlers de paix en cours à Doha entre le gouvernement de la République et le mouvement rebelle AFC/M23. Déchu de ses immunités parlementaires par le Sénat, Kabila est désormais poursuivi par la justice militaire. Son absence prolongée de Kinshasa, constatée depuis plusieurs mois, suscite déjà l’interrogation quant à sa présence effective à l’audience.

Des accusations lourdes et sans précédent

Le dossier est explosif: l’auditeur général des FARDC reproche à l’ancien chef de l’État une implication dans un mouvement insurrectionnel, des crimes contre la paix et la sécurité de l’humanité, ainsi qu’un homicide intentionnel par balles. À ces accusations s’ajoutent cinq autres chefs d’inculpation: trahison, apologie de la rébellion, viol, torture, et participation à la déportation et à l’occupation armée de la ville de Goma. Ces griefs font écho à ceux formulés contre Corneille Nangaa, leader du mouvement AFC/M23, et 25 autres responsables militaires et civils jugés par contumace en août 2024. Tous avaient été condamnés à mort pour leur participation présumée à la rébellion du M23, soutenue par le Rwanda selon Kinshasa.

Entre justice et paix: un équilibre délicat

Alors que le Vice-Premier ministre en charge de l’Intérieur, Shabani Lukoo, affirmait récemment à Jeune Afrique que Joseph Kabila serait «pris en charge dans le cadre de l’accord de Doha, négocié directement par ses hommes», l’annonce de l’ouverture de son procès a pris de court l’opinion nationale et internationale. La démarche judiciaire surprend d’autant plus que la Déclaration de principes signée à Doha préconise des mesures de confiance mutuelles pour favoriser la réconciliation. Le Conseil national de suivi de l’accord de la CENCO -CNSA-, dirigé par Joseph Olenghankoy, a d’ailleurs appelé le président de la République à «prendre toutes les mesures nécessaires pour préserver l’unité et l’intégrité du territoire national». Le suspense est encore alimenté par la tenue, ce même vendredi, d’une conférence de presse annoncée par le mouvement AFC/M23, qui devrait livrer sa position officielle.

Kabila, entre silence et posture politique

Fin mai, Joseph Kabila avait fait une rare apparition publique à Goma, aux côtés du porte-parole du M23, Lawrence Kanyuka. Il y recevait des leaders religieux locaux dans l’une de ses résidences, avant d’élargir ses consultations à d’autres composantes de la société civile à Bukavu et dans le Nord-Kivu.

Dans une allocution diffusée peu après la levée de ses immunités, l’ancien président avait vivement dénoncé ce qu’il qualifie de «dictature» du pouvoir actuel, reprenant à son compte plusieurs revendications portées par l’AFC/M23. Il appelait alors à un dialogue national inclusif comme voie de sortie à la crise sécuritaire persistante à l’Est du pays.